manifesto

contre


CONTRE un art-apparent un art-apparat
CONTRE un art qui ne sert, en substance, qu'à s'élever ou se conforter socialement   à exhiber sa petite et humaine misère   à satisfaire son besoin de regard
CONTRE un art-miroir (Narcisses)

CONTRE un art de croûtes, de paroles vides
CONTRE un art de sciences étalées, de communautés complaisantes

POUR un art sale
POUR un art du souffle
POUR un art contre la mort 
POUR un art contre et pour la vie contre la réalité 
contre et pour la brûlure du Réel


CONTRE un art du convenu 
CONTRE un art des petits sujets bien pesés
CONTRE un art des aveugles qui répètent - sans voir - des gestes, des images, des formes, des formats et croient
mais POUR un art aveugle qui se jette contre les murs en appuyant fermement sur les paupières
CONTRE leurs toiles et leurs châssis posées a priori 
CONTRE l'art comme faire-valoir

faut-il pulvériser leurs petites toiles huileuses pour qu'ils comprennent ce qui ronge 
de l'intérieur ?
ce qui avale ?
ce qui pousse à ouvrir les mêmes béances ?
ce qui pousse à se jeter la tête en avant contre le mur  ?


[09 mai 2014]


amour de croûtes - le retour du Christ
à propos de la réception de l'oeuvre de Vincent Van Gogh


d'une oeuvre-surface
qui se donne à voir seule, sur le dessus
sans avoir besoin d'aucune science, d'aucune théorie transcendantale  autre que le mythe de l'homme-Dieu 
et autre que celle, parfaitement lisible, d'une rupture d'apparence "savante" (avec le passé proche, avec les codes d'alors) - 
rupture  qu'il fait bon d'approuver et d'appeler - pour pouvoir jouir de sa position de "spectateur éclairé"

d'une oeuvre-oeil où, à l'inverse des allégories et des codes historiques, on peut regarder simplement et facilement à travers une tête, un oeil (qui a été)

d'une oeuvre-surface littéralement "sans profondeur" - autre que celle physique, matérielle de la croûte, de la patte :
d'une oeuvre qui, littéralement, peut ébranler sans besoin d'arrière-fond dans une jouissance première de la couleur, de la matière/de la croûte


d'une oeuvre-jouissance : 
jouissance première du sensible à portée d'oeil et à portée de cerveau d'abord ;  
jouissance de soi, ensuite, par le biais de son propre regard mis en abime - regard qui pose le regardant tant que spectateur éclairé et en tant que  - Narcisse s'ignorant et s'aveuglant- identique possible génie non reconnu, non avoué par la société qui lui est contemporaine



d'une oeuvre-miroir
où le regardant s'admire à travers une surface opaque
où l'on jouit, autant que de la "fête de l'oeil", du geste radical réalisé à l'échelle d'une vie, à l'échelle d'une société - geste qui dépasse de loin l'oeuvre et demeure sa seule mais nécessaire transcendance : 
celui d'un homme qui renvoya la société à dos
celui d'une société qui, en retour, a déchu l'homme -
créant un mythe qui justifie l'absurdité des tendances mais les accepte en choisissant pour le présent un élu (sacrifié) et en recréant une tendance contemporaine du "bon-goût" -
créant un mythe qui, quasi religieusement, persiste à croire à la possibilité d'une récompense et d'une reconnaissance posthumes pour chaque pécheur


d'une oeuvre-mythe qui n'est éclairée, qui tient dans la postérité, essentiellement par le biographique (qui s'y réduit ?) 


d'une oeuvre 
ni politique
ni allégorique
ni savante :
d'une oeuvre-brute qui ne donne à voir  que des pays, des vues, des paysans : des morceaux de réalité (juste déformés par le mythe) mais "reconnaissables


[09 mai 2014]



et pendant ce temps 


et pendant ce temps-là, ils croissent/ils croient

il faut devenir urgemment - contre
il faut reprendre l'espace, la puissance, le labeur
car ils continuent d'avancer 



[09 mai 2014]


f.a.b.r.i.q.u.e.r.
à propos de l'oeuvre de Joan FONTCUBERTA


oeuvre-éloge
du simulacre, du dé-croire.


mettre à voir       l'oeil 
dans le creux des langues
dans l'entre
dans ce qui est/pas 
(simultanément)


METTRE À VOIR 
ET SIMULTANÉMENT ENFOUIR LE REGARD


remplir le monde de creux

de vases 
pour en montrer l'envers.
parsemer de bombes vides
: désamorcer, 
apprendre à douter le réel

(en déconstruire l'écriture)


(sur-jouer)


appuyer le réel par son envers
envahir (le réel) 
de codes-sans-codes de codes creux de codes-faces.
SUR-JOUER-SUR ce qui s'énonce, ce qui se donne "comme".

incessamment moquer la pensée-paraître, la pensée-qui-se-donne-pensée, la pensée-croyant-penser


f.a.b.r.i.q.u.e.r. contre


passer une oeuvre à rire le monde
à annuler le réel
à exposer/réveler l'absurde 
à détacher le regard


construire un, mille châteaux forts de paroles vides, de paroles qui déplacent qui dé-croient qui re-croient qui tissent le réel qui l'entourent, le vacillent : construire un labyrinthe, des labyrinthes de signes vides


INONDER LE RÉEL DE COQUES, DE VRAI-SEMBLABLE



FAIRE DE L'ART COMME rire
/contre ceux qui, sérieux, croient le regard
/ rire partout-rire de tout
rire
comme (antique) mode d'être - en bouclier
des bien-pensants, des "je-suis je-suis" 

et (surtout) jouir de la danse macabre qui s'y joue 



[06 février 2014]





PEINDRE-PANSER




R.E.C.O.U.V.R.I.R toutes les surfaces possibles (du réel)

: peindre comme P.A.N.S.E.R




[21 octobre 2013]



AU-DELA DE LA PHOTOGRAPHIE




une certaine catégorie d'image photographique, aujourd'hui, ne suffit pas - ne suffit plus.
dans un musée, elle devient inutile :
image avalée, reflet pâle du réel.
de naissance facile - "image-clic" (aussitôt née, aussitôt avalée par nos yeux boulimiques), elle se fond 
dans nos mémoires dynamitées
dans nos pupilles
entre toutes les autres images 

l'image photographique est trop souvent la trace d'une subordination à un appareil omnipotent et
à un réel qu'on ne parvient pas à réinventer :
c'est un contre-gouffre qu'on ne veut surtout pas ouvrir.
il n'y a pas-peu de choix pour l'opérateur:
juste un découpage du réel (un cadrage), un sujet à trans-mettre à des yeux pourtant déjà en overdose.
aujourd'hui, dans une certaine photographie, il n'y a plus que des redites d'images
des ennuis d'images 
des déjà-vu.
à quoi bon exposer (encore)ce genre d'images aujourd'hui?

l'image photographique percute l'oeil atone

lorsqu'elle s'étend
lorsqu'elle envahit le regard dans le monumental et engloutit le corps du regardant
lorsqu'elle brouille les pistes du réel
lorsqu'elle fait apparaitre ses propres conditions d'apparition et rend l'oeil silencieusement intelligent
lorsqu'elle s'accroche dans l'entre-deux - au delà d'elle-même -
dans le gouffre d'une interprétation multiple, d'une narration à mille vitesses, à mille visages
lorsqu'elle est répétition : s'ancre aux pupilles, blesse nos cornées surexposées
lorsqu'elle s'accroche à bout de bras à la poésie, lorsqu'elle devient poésie même :



il nous faut des images-temps
des images-gouffres
urgemment

[02 août 2013]



ART PAUVRE

contre le divertissement et la consommation
contre les faire-valoir
penser l'art comme souffle
- dans la contemplation.

contre l'art estampillé
contre l'art des "croûtes" :
l’art non-ostentatoire


penser l'art comme nécessité et
semer des pratiques : des "faire"

élever l'art comme puissance du quotidien
comme reconquête du réel
comme retournement de la réalité
comme épanouissement à être


éveiller à l'art : ouvrir des portes 
- à la réalité - dans l'Homme

[4 juillet 2013]




ARRACHER LA PEINTURE

à propos de l'oeuvre de Simon Hantaï


NOTE 1

surfaces accidentées : portions d'espace brut
élever des pliures, en Dieu, des monts et vallons (abstractions de paysage)
puis plonger : 
se perdre dans, à la surface de
le corps dans, le corps sur, le corps sous
à l'épreuve 


avec patience, nouer des protocoles
religieusement, rationnaliser l'obsession
muter le temps, devenu même et autre 
(répétitions et différences) 
pour des religieuses expériences de laboratoire (marier la méthode et la recherche du sacré)
chercher
chercher encore
(mû par le vide):

ARRACHER LA PEINTURE


NOTE 2

descendre le support de la verticalité, de l'historique révérence
l'étendre/le tendre : en faire des tapis de lumières et des murs d'autels
la peinture prolétaire : la peinture des petites mains, des gestes en chaine et des grands espaces : la peinture non -ostentatoire




DU (BON) MODE DE VISIBILITÉ DES OEUVRES D'ART

C.O.N.T.E.M.P.L.A.T.I.O.N.

l'art comme retraite et ouverture
le regard investi et volontaire, 
le corps immobile mais présent, offert

[08 juin 2013] 




PETIT SOLDAT DE PLOMB

toi petit pion masque de sel pâle pâle soldat du vide remballe ton petit monde absurde tes faux prophètes tes codes de pacotille tous ces chemins déjà tracés où tu crois renverser le monde. remballe les cases vides que tu t'empresseras de remplir tes moules à statut ton vieux penser tes sentiers de gloire tes réseaux de paraître tes cubes blancs et 
tes idées de papier mâché : tous les grotesques de ta société de spectacle 
toi aveugle petit pion ne connait pas l'inconnu, ne connait pas le lent dévoilement du monde : seulement les images vides les images mêmes les décalques

tandis que nous, silencieusement, dans l'angle mort, nous construisons des énigmes


[30 mai 2013]



(M'EN) VA T'EN GUERRE


(de la nécessité de se positionner) 

pour l'art des bouts de ficelle / contre " l'art-faire valoir" contre l'artifice /contre les réseaux / contre la valeur marchande / pour l'informe / pour l'entre-deux l'entre-trois l'entre-quatre : contre les cases / contre les noms(-prisons, les noms-scléroses) / pour l'abîme / contre le vide / pour l'intuition / contre l'intention  /contre les cubes blancs / pour le réel / pour l'en-bas / pour l'ombre / contre les codes / contre les écoles / contre les maîtres / pour l'ignorance / pour l'Homme


[26 mai 2013]



RÉEL II

voler au réel ses parures

[24 avril 2013]




CONNAISSANCE PAR LES GOUFFRES

de pages blanches comme de gouffres


[06 avril 2013]  




EPOUSER L'INCONNU


dénouer les savoirs et les gestes imprimés-répétés : faire à l'aveugle et se risquer à la brûlure/.se laisser porter aux chemins de traverse /.pour épouser l'inconnu (intime)


[06 avril 2013]  



EXPLOSER-EXPOSER


contre le monde contre la brûlure du Réel :

troquer la rage au désespoir
exploser le monde 

[30 mars 2013]  




RÉEL I


brûler la vie cramer la vie brûler le monde sans brûler la tête et le corps : destructions-cibles (révolutions)

[29 mars 2013]  




NÉANT


ne plus prendre les figures comme prétextes :
accepter de se confronter au néant

[2 novembre 2012]  




BOITER À LA VIE


faire
comme fuite systématique     (hors de la présence à la réalité) comme retranchement
comme boiter à la vie
comme comblement du temps
comme poussée du néant

[2 novembre 2012]



CONTRE-IMAGES II 


contre-images : produire des images comme on lance des coups de poing.

recouvrir la feuille avec patience et faire l’épreuve du temps.

des images, ne garder que la transe, que la force :effacer tous les discours

faire des images qui contredisent toutes les autres images mais des images qui hurlent pour ne rien dire.


faire des contre-images, urgemment

des "choses" muettes
et à travers elles, surtout, détruire les faux prophètes.



[30 octobre 2012]



CONTRE-DISCOURS


ne pas être un « faiseur de discours » (sur l'art) mais faire l'art même. 
ne pas parler d'art : être là, l’art même


[26 octobre 2012]




EXISTER


aujourd’hui: sortir avec urgence 
se penser dans  - plus contre
purger l’art devenu pathogène 
qui, contaminé, s’étouffe, se gangrène
(devenu néant).

renverser pour être vu 
accepter la mise à nu 

[25 octobre 2012]



ÉCRITURES


« trans-écrire » : 

construire des murs de béances

entourer de vide 
écrire avec une hache
écrire avec le temps
jusqu’à obtenir des bris de phrases


ne retenir des mots que leur capacité à résonner  
(pouvoir d'évocation)


[octobre 2012]




SILENCE


contre les discours pédants
les langues agitées
les références multiples (étagères)
contre les classes supérieures : 
faire l'éloge du non-savoir
du dépouillement suprême
           pour pouvoir accueillir
[octobre 2012]



INCISIONS


graphein : incisions et cicatrices 

mettre à jour des tremblements.

jouer le graphite   contre la feuille.
entre tensions    provoquer le trait faible

[16 janvier 2012]




RÉPÉTITION-REPRODUCTION


métamorphoses :

dessous, dedans, dans 
repasser     dépasser    transformer la figure
successivement projeter la forme.
se souvenir de la précédente pour faire suite : 
un trait impose l'autre

[janvier 2012]




REPRÉSENTATION


pourquoi rajouter des images      encore ?
inutiles représentations, impossibles représentations.

[15 janvier 2012]





CONTRE-IMAGES I


Rajouter non pas des images à ce monde, mais des énigmes.


[15 novembre 2011] 




TOTALITÉ


d'une pratique artistique pensée non en termes d’œuvres mais de cycles et d'études : de totalités lacunaires


de l’urgence (aujourd'hui)à penser le processus contre le produit

penser l’innommable (le sans nom plutôt que le sans titre) 
contre l'étiquette (la sclérose)
contre les académies

penser l'inachèvement, l'expérimentation - les chemins, les mouvements

contre le pastiche
contre les tendances

de l'urgence d'autoriser, à même la pratique, la confrontation des temporalités, des regards et des identités



[10 novembre 2011]




DISPARITIONS


a.urgence de SOUS-EXPOSER.

b.disparaître pour (ré)apparaître/apparaître en disparaissant

incessamment, se dérober :
se dérober aux circuits, à la petite gloire.


c.alors : où ? comment ? faut-il garder intime, secret, cloîtré ? brouiller ? empêcher ? jusqu’au néant/jusqu’à se confondre même avec le néant? 


d.prôner une économie du montré :
refuser les modes publicitaires, la surexposition, l’envahissement, l'invasion.
préférer l'impact silencieux.


e.montrer pour la contemplation dans la contemplation dans la durée        
(sentir le Temps)
refuser le passage, la précipitation, l'absence à, le voir pour voir.


[4 octobre 2011]




ORIGINE 


à l'origine

ce vide       IMMENSE       trou noir(au milieu du corps):
béance
à l'origine, cette tête-ogre
juste combler l'ennui
remplir le temps
puis sortir le poids du réel:  (...) exister

[septembre 2011]